Théophile Legrand (1799–1877) est une figure emblématique de l’industrialisation textile du Nord de la France. Héritier d’une lignée d’industriels, il modernise profondément la production lainière en introduisant la mécanisation du peignage et du tissage. Visionnaire, il fonde plusieurs usines dans la région de Fourmies, faisant de celle-ci un pôle textile majeur, tourné vers l’exportation. Sa réussite repose sur des produits réputés pour leur qualité, mais elle s’appuie aussi sur un système de production intensif, marqué par des cadences soutenues et des conditions de travail éprouvantes pour la main-d’œuvre.
À sa suite, la famille Legrand poursuit et structure cette aventure industrielle. En 1883, une société en nom collectif « Les Fils de Théophile Legrand » est créée pour exploiter les établissements lainiers familiaux. Elle gère les activités de peignage, filature et tissage dans les villes de Fourmies et Glageon. Cette société est réorganisée en 1889, avant d’être dissoute en 1895, scindant les sites de production en deux entités indépendantes.
C’est dans ce contexte qu’est fondée en 1896 la société Adrien Legrand & Cie, dirigée par Jean-Baptiste-Théophile-Adrien Legrand, petit-fils de Théophile. Elle reprend l’exploitation de l’usine de Glageon, avec pour spécialités la filature de laines peignées et la fabrication de tissus de laine. Le site, situé 2 rue du Moulin (ancien moulin à grain), devient un acteur industriel de poids à l’échelle régionale, avec un vaste ensemble associant filature, tissage et ateliers.
Durant la Première Guerre mondiale, l’établissement est dévasté. Pourtant dès 1920, Adrien Legrand & Cie entame la reconstruction du site industriel, avec notamment un nouveau tissage et des ateliers de mécanique. Le site prospère de nouveau, avant de devenir, en 1983, un entrepôt industriel géré par la communauté Emmaüs.